L’habit dans la Bible :
une analyse biblique proposée par le Père Bertrand Chevalier.
Ces quelques lignes n’ont aucune prétention ! Elles ne veulent pas être une étude sur le sens des vêtements dans la Bible mais elles sont plutôt une invitation à regarder Jésus.
Notons d’abord qu’il est souvent question de vêtement dans la Bible. Il suffit d’ouvrir la première page du Livre de la Genèse pour voir Dieu revêtir l’homme et la femme de tuniques de peau (Gn 3,21). Le vêtement a une place importante dans la Bible : il est lié à la personne et la distingue, il est un signe d’identité (cf. Gn 37,33), il marque son identité sexuelle, il dit le pouvoir et la richesse. Mais le vêtement est aussi un acte de fraternité (1Sa 18,3-4) et de justice (Ez 18,7 et Mt 25, 34-36). Pour approfondir, une recherche dans le Vocabulaire Théologique Biblique sera précieuse. Pour notre propos, demandons-nous simplement ce qu’expriment les vêtements de Jésus.
La première allusion sur les vêtements de Jésus se trouve dans l’Evangile de Luc lorsque l’ange déclare aux bergers : « Aujourd’hui, dans la ville de David, vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur. Et voici le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire » (Lc 2,11-12).
Notons dans cette parole de l’ange que les langes sont le signe de reconnaissance du Sauveur ! C’est le premier vêtement de Jésus, vêtement qui finalement dit notre humanité. En Jésus, Dieu s’est totalement revêtu de notre humanité, une humanité avec ses limites et ses pauvretés, avec sa finitude aussi : la mort. Les icônes orthodoxes de la Nativité ne se trompent pas en représentant le nourrisson de la crèche, non pas enveloppé de langes, mais totalement prisonnier dans les bandelettes d’un linceul. Elles annoncent ainsi déjà la mort de Jésus. Le vêtement de Jésus à sa naissance nous révèle donc le chemin de Jésus : il est venu pour nous rejoindre dans tous les lieux de notre humanité, pour se faire notre frère en humanité jusque dans notre mort !
En poursuivant les Evangiles, Jésus dépose son vêtement (Jn 13,4) pour laver les pieds de ses disciples puis il le reprend ensuite (Jn 13,12). Ce geste n’est pas banal ! Il est une véritable Révélation : Jésus annonce ici le sens de sa mort sur la Croix (voir Mt 27, 35 et Jn 19,23). En déposant librement son vêtement, Jésus se livre, il se donne totalement par Amour. Ce geste de dépouillement, véritable humiliation pour un juif à l’époque (voir Ha 2,15), devient signe de son Corps livré par Amour. Jésus se dépouille pour rejoindre Adam et Eve dans leur nudité. Il laisse sa tunique d’une seule couture (Jn 19,23) entre les mains des soldats pour recouvrir l’humanité de son Salut. Nu et outragé sur la Croix, il revêt notre humanité d’un vêtement de miséricorde. C’est bien ce que fait le Père au retour de son fils prodigue (Lc 15, 22) ! C’est ce qu’annonçait le prophète Isaïe (Is 61,10). Jésus s’est revêtu de notre humanité pour nous habiller de sa divinité en nous enveloppant de son salut et de sa miséricorde.
Aussi, le vêtement que Jésus nous propose de porter, c’est désormais celui de « l’homme nouveau » (voir Ep 4,24 et Col 3,10), ce vêtement spirituel qui est le Christ lui-même. Par notre baptême, nous avons revêtus le Christ, nous sommes tout entier enveloppés de son Salut et de sa miséricorde. Symboliquement, se vêtir du vêtement de Salut, c’est vivre de sa vie ! Saint Paul le proclame ainsi : « Car pour moi, vivre c’est le Christ » (Ph 1,21). Ayant fait l’expérience de cette rencontre fulgurante avec le Ressuscité, il n’aura de cesse de recommander à ses communautés de se revêtir du Christ. Il faut lire ici la finale de l’épître de Paul aux Ephésiens (Eph 6, 11-16).
Que retenir de ce petit parcours biblique ? En regardant les vêtements du Christ, nous sommes invités d’abord à rendre grâce pour ce Salut et surtout à ne pas mettre notre orgueil dans nos vêtements. « L’habit ne fait pas le moine » dit cette maxime célèbre. Jésus, à sa manière, la dit en avertissant les scribes et les pharisiens du risque de se compromettre quand ils cherchent le pouvoir, la richesse, la reconnaissance et les premières places… : « Toutes leurs actions, ils les font pour remarqués des hommes. Ils élargissent leurs phylactères et allongent leurs franges » (Mt22, 5). L’ensemble du chapitre 22 de Matthieu est un message qui appelle à la conversion. Il s’agit de nous revêtir du Christ et de vivre de sa Parole !
Comment ne pas penser à un François d’Assise, à un Charles de Foucauld ou à une petite sœur Magdeleine de Jésus qui, à la suite du Christ, ont choisi la voie de l’abandon, du dépouillement et de la pauvreté, voie royale de la fraternité… Ils nous apprennent aujourd’hui comment accueillir ce « plus beau vêtement » que le Père nous offre !